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Le mouvement Extinction Rebellion est aussi divers et riche que les rebelles qui y participent. Cet est espace « Parole de rebelles » est ouvert à toutes les contributions personnelles ponctuelles. Les avis exprimés ici par les rebelles sont personnels et n'engagent que leurs auteur·e·s et pas le mouvement Extinction Rebellion dans son ensemble (France et International).

Le 4 décembre dernier, Luigi Mangione abattait de 3 balles Brian Thompson, le PDG de UnitedHealthCare, la principale sécurité sociale privée étatsunienne et l’une des dix entreprises les plus rentables de la planète. Ce meurtre, hautement répréhensible, n’a pourtant pas été jugé criminel par l’opinion publique étasunienne1 qui, au contraire, a érigé ce tueur au statut de héros2. L’internet étant ce qu’il est, Luigi est devenu une source inépuisable de memes, particulièrement pour déclarer sa flamme en ce 14 février. Or, un meurtre est bel et bien un crime et non une blague pour internautes et amoureux de la révolution. Comment l’acte de Luigi Mangione a-t-il pu transcender ce dernier en icône ?

Portrait iconique de Luigi Mangione
Deny Defend Depose

Chacune des 3 balles portait l’un de ces mots : Deny (refuser) - Defend (défendre… le refus) - Depose (classer… la demande) en écho à la tactique utilisée par UnitedHealthCare et d’autres assurances de santé privées pour refuser les demandes de remboursement de soins qui leur étaient adressées. Une enquête du New York Times estime ainsi que la politique de remboursement de Brian Thompson a conduit à la mort de 600 000 personnes et au surendettement d’encore plus.

Ces pratiques des assurances privées s’inscrivent dans un système plus vaste : le nécro-capitalisme dont les États-Unis sont à l’avant garde.

Contexte Étatsunien

Aux USA, mis à part une sécurité sociale basique mise en place par Obama et d’autres démocrates avant lui, les étatsunien·nes sont contraints de recourir massivement à des assurances privées qui sont onéreuses et partielles. Les tarifs des soins sont dérégulés et en moyenne 64 % plus chers qu’en France. Pour toutes ces raisons, 22 % de la population a renoncé l’année dernière à des soins faute de moyens (contre 2 % en France).

Ce modèle de capitalisation sur la santé vient menacer directement les acquis sociaux français obtenus par les résistants en 1945 et commence à s’insinuer ici.

À l’heure où le Président Macron annonce 109 milliards d’euros d’investissements « privés français et étrangers » pour des projets de développement de l’IA mais où le déficit de la Sécurité Sociale est de seulement 25, nous sommes en droit de nous demander si la priorité du gouvernement est la survie de son peuple ou le fantasme de croissance qu’incarne la tech.

Par manque de fonds, le système de soin public français se dégrade et l’augmentation du coût de la vie pour les travailleur·euses de la santé dégouté·es pousse de plus en plus de patient·es et de thérapeutes vers les établissements privés où les dépassements d’honoraires sont la règle, ouvrant la voie à un système de santé à plusieurs vitesses et à l’apparition de sécurités sociales privées pour les plus riches.

La santé pas la seule menacée

Le nécro-capitalisme s’entend bien au-delà du capitalisme médical et de la nécessité sociétale absolue de sauver l’hôpital public et de protéger les soignants.

Il est dans l’exploitation de la planète et sa destruction, dans l’apprentissage de la haine de l’autre et la création d’ennemis qui n’en sont pas. Il est dans l’empoisonnement de l’air et de l’eau, dans le gigantesque massacre des animaux, dans toutes les vies vécues dans l’exploitation et la pauvreté et dont on estime qu’elles peuvent toujours vivre avec moins.

À l’heure où l’on voudrait que l’on ait plus peur des réfugié·es en bateau que des PDG milliardaires en limousine ou Tesla, le geste de Luigi remet les pendules à l’heure : nos vies (et nos morts) sont des sources inépuisables de profit pour quelques ultra-riches.

Cet autocollant est un rappel de notre commune humanité et une exhortation à démanteler des systèmes qu’ils pensent inattaquables. Cela est nécessaire pour nous, comme pour eux, s'ils ne veulent pas avoir une multiplication de Luigis.

Make Capitalists Afraid Again!

Portrait iconique de Luigi Mangione

1 Source : Most Americans blame insurance profits and denials alongside the killer in UHC CEO death, poll finds (AP

2 Source : États-Unis : Luigi Mangione, nouveau héros d'une Amérique révoltée (Blast)