Lettre ouverte à HDF Energy, la Préfecture de Guyane et aux élu.es soutenant le projet CEOG
Une centrale photovoltaïque vous dites ? C’est bien le projet. La Centrale Électrique de L’Ouest Guyanais (CEOG), utilisant la technologie Hydrogen Power « la solution la plus prometteuse pour résoudre le problème de l’intermittence des énergies renouvelables »1 De quoi alimenter « l’équivalent de 10 000 foyers à un coût compétitif »2 . Admettons.
Mais où l’implanter ? Ne serait-ce pas une terre Kali’na que vous déboisez là ? N’entendez vous pas la colère de ses habitant.es ? Ne voyez-vous pas les ibis verts, les grimpars striés et les butors zigzag, ces animaux menacés (parmi d’autres) dont vous détruisez l’habitat ?3 N’entendez vous pas leurs cris de rage ?
Car c’est bien de la rage qu’il s’agit désormais … Après avoir mis des habitant.es, dont le chef coutumier, en garde à vue ; après avoir détruit leur forêt ; après avoir volé leurs terres ; vous persistez … et la colère gronde … « La forêt nous rappelle qui nous sommes, nous les Kali’na, en tant que peuple, elle transmet à nos enfants notre vision du monde. Elle subvient à nos besoins et nous permet de vivre en paix. Nous trouvons grâce à elle la sécurité et l’épanouissement. »4 . En détruisant ce lien intime entre un peuple autochtone et la forêt, votre projet s’inscrit dans une longue tradition colonialiste. Et l’État soutient activement …
De plus, votre fameux projet « non polluant » nécessite de raser environ 75 ha de forêt (16 ha sont déjà perdus …). C’est contradictoire ne croyez-vous pas ? Cette forêt se situe en plein cœur du Parc naturel régional de Guyane et est également une Zone Naturelle d’Intérêt Écologique, Faunistique et Floristique (ZNIEFF). Elle abrite, au moins, 165 espèces d’oiseaux dont 20 % environ sont protégées3. Et ce n’est que le sommet de l’iceberg puisque les espèces végétales et animales Guyanaises sont loin d’avoir été toutes identifiées. Vous ne savez donc même pas ce que vous mettez en danger …
De plus, qu’en est-il de la captation de CO2 par les arbres ? D’après un article de la revue Nature Climate Change5 , ce type de biotope participe à hauteur de 24 % à la captation de CO2 par les forêts à l’échelle mondiale. Et vous arrachez 16 ha centenaires pour une centrale ayant une durée de vie de 25 ans … Nous parlons de la forêt Amazonienne, les « poumons de la Terre », qui a déjà atteint son point de non-retour6 En vous obstinant, vous jouez avec notre survie. Votre projet est donc une attaque contre le Vivant. Et l’État soutient encore …
Ces arguments vous sont connus. Les habitant.es du village Prospérité se sont fait.es entendre et iels iront « jusqu’au bout ». Pourquoi persister ? Est-ce à cause des financements du groupe Meridiam, du soutien de la CTG ou des mairies ? Toutes ces institutions encouragent la « croissance verte », principe absurde qui part du postulat que notre planète dispose de ressources infinies, que la technologie nous sauvera de l’extinction et que le Vivant est une ressource exploitable. Rappelons que cette idéologie nous amène à +3 °C et que la Guyane sera inhabitable, d’après les scientifiques du GIEC7 … Cela met votre CEOG en perspective.
L’État n’est pas en reste puisque la préfecture harcèle littéralement les villageois.es en multipliant les passages de gendarmes. Est-ce par peur de la colère Kali’na qu’Emmanuelle Wargon se déplace incognito en Guyane ? Une prise de position de la part de la présidente de la commission de régulation de l’énergie serait bienvenue …
Pour toutes ces raisons, nous, rebelles d’Extinction Rebellion Guyane, en soutien au peuple Kali’na, exigeons l’abandon du projet de la CEOG et le retrait immédiat des machines destructrices des terres autochtones. Les dégâts sont déjà bien trop lourds … arrêtons le massacre !
Avec Amour & Rage … toujours
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HDF A propos de nous, consulté le 25/02/23 -
CEOG Le projet, consulté le 25/02/23 -
« Guyane : une centrale à hydrogène va détruire 50 ha de forêt amazonienne avec la complicité de l’État français », La Relève et la Peste, 10 mai 2021, Augustin Langlade ↩
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Zad en Guyane : « Nous ressentons la déforestation dans notre chair », Reporterre, 9 décembre 2022, Gaspard d’Allens et NnoMan Cadoret ↩
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Harris, N.L., Gibbs, D.A., Baccini, A. et al. Global maps of twenty-first century forest carbon fluxes. Nat. Clim. Chang. 11, 234–240 (2021). ↩
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« Déforestation : l’Amazonie a atteint son point de bascule », Reporterre, 9 septembre 2022, Hortense Chauvin ↩
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« Changement climatique : ce qui pourrait attendre les Guyanais pour les 100 prochaines années », Guyane la 1ère, 10 novembre 2022, Ludmïa Lewis ↩