Durant des mois, de vives discussions ont agité XR UK à propos d’une action ambitieuse et risquée : bloquer le trafic du plus grand aéroport de Londres, Heathrow, au moyen de drones. Les tensions ont finalement abouti à la création d’un groupe indépendant d’XR, nommé Heathrow Pause. Leur mode d’action est strictement non-violent, et comporte une composante sacrificielle revendiquée.
C’est très simple et, en principe, presque enfantin: prévenir longtemps à l’avance de ses intentions, pour que les compagnies aériennes et les passagers puissent prendre leurs précautions ; au jour prévu, avertir les forces de sécurité qu’on va faire s’élever un drone à l’intérieur du périmètre d’exclusion qui entoure l’aéroport, ce qui selon les règles en vigueur est censé suffire pour qu’aucun avion n’ait le droit de décoller ; faire effectivement voler un drone pour enfant, pas plus haut que la hauteur d’un homme ; à la fin du vol, prévenir la police de sa position, et attendre l’arrestation. - Répéter cette opération, autant de fois qu’il y a de volontaires.
Une activiste de 70 ans fait voler son drone dans la zone d’exclusion.
Par ce moyen, et par l’émotion puissante qui résulterait de l’interruption du trafic aérien, obtenir enfin une conversation honnête sur le sujet de l’aviation et de ses effets désastreux ; faire notamment échouer le projet dément, mais bien réel, d’une troisième piste à Heathrow.
Cependant la mise en œuvre du projet à la fin de la semaine dernière n’a pas abouti aux effets escomptés. Sans doute à cause de systèmes de brouillage, tous les drones n’ont pas pu décoller. Les arrestations ont été nombreuses : le dernier chiffre connu est de vingt. Les arrestations ont été nombreuses : le dernier chiffre connu est de [màj ] vingt-quatre. Les risques juridiques encourus sont très élevés. Notamment, Roger Hallam, connu comme co-fondateur d’Extinction Rebellion, qui avait été arrêté préventivement puis relâché vendredi, a été arrêté une seconde fois samedi alors qu’il se rendait dans la zone d’exclusion pour y piloter son drone: il a été placé en détention pour attendre un procès qui aura lieu dans quatre à six mois.
Mais surtout, le trafic d’Heathrow n’a pas été interrompu jusqu’à présent, ni perturbé.
Il est juste de saluer les membres de Heathrow Pause, qui n’ont pas mis un terme à leur action. Ils ont risqué leur liberté pour le bien commun et méritent notre reconnaissance. Échec d’ailleurs, ou demi-succès ? Même si l’impact n’a pas été celui qu’ils escomptaient, on parle de leur geste bien au-delà du Royaume-Uni, et bien au-delà des cercles des militants convaincus d’avance.
Rappelons-le : l’avion, c’est déjà environ 5% du forçage radiatif qui concourt au réchauffement climatique. C’est une croissance folle, qui pourrait faire doubler le nombre des vols dans les quinze prochaines années. L’avion déplace des centaines de millions de gens qui seraient mieux chez eux vers des endroits qui seraient mieux sans eux. Ses infrastructures détruisent de larges espaces, la pollution qu’il engendre est considérable, le bruit qu’il génère nuit à notre santé. Il profite très majoritairement aux plus riches, et nuit à tout le monde - de façon inégale toutefois, car ses nuisances touchent davantage les plus pauvres.
Et ce n’est pas en mélangeant de l’huile de récupération dans le kérosène qu’on fera de l’avion autre chose que ce qu’il est : une catastrophe pour le monde.
L’aviation : la défendre, ou défendre le vivant, il faut choisir. Il n’y a pas d’aviation verte.
Mise à jour du 20 septembre : lire le bilan détaillé de l’action au 19 septembre sur le site d’Heathrow Pause.