Alors que l’urgence climatique est de plus en plus insoutenable, le bois énergie est massivement développé que ce soit pour produire de la chaleur et de l’électricité dans l’Union Européenne. Le bois a été subventionné pour fournir de l’électricité car le bois est considéré comme une source d’électricité bas carbone. Par conséquent, la production d’électricité au bois a été multipliée par 5 dans l’Union Européenne depuis 2000.

Le bois est constitué pour moitié de carbone. On pourrait s’attendre à ce que le brûler émette énormément de gaz à effet de serre.  Pourtant, depuis les négociations de Kyoto en 1997, le bois est considéré, dans les conventions climatiques, comme une source d’énergie bas carbone. La raison ? On considère que, dès lors qu’un arbre est replanté pour remplacer le bois brûlé, les émissions de gaz à effet de serre (GES) sont annulées : l’arbre qui repousse recaptant le CO2 émis. Le règlement de l’UE sur les GES adopté en 2018 suit ces recommandations.

En apparence, si on se fie aux données de la base carbone de l’ADEME, le bois est une énergie peu carbonée. Si l’ADEME compte bien les émissions de GES liées aux activités de bûcheronnage ou de scierie, elle ne compte pas les émissions de la combustion. Elle évalue que le bois utilisé pour produire de l’électricité est neutre en carbone et émet entre 14 et 41 gCO2e/kWh. Cependant, 500 scientifiques ont adressée une lettre à l’UE et aux USA  en 2022 pour demander de réexaminer la neutralité carbone du bois , car il  faut savoir combien de temps la forêt met-elle à compenser les émissions de la combustion du bois.

Quand on compte les émissions en sortie de chaudière, une centrale électrique au bois émet 1600 g de C02/kWh soit 1.5 fois plus de C02 que l’électricité au charbon, 2 fois plus que l’électricité au pétrole et 3 fois plus que l’électricité au gaz.  Selon le type de gestion forestière, cela peut prendre des décennies voir un siècle pour compenser la combustion du bois. Le bois énergie est donc loin d’être neutre en carbone.

Le bois fournit plus du quart de toute l’énergie de chauffage utilisée en France. Quel est l’impact du chauffage au bois sur le climat ? 

L’analyse de cycle de vie (ACV) utilisé communément pour le bilan carbone du bois énergie est de 30 gC02/kWh car la combustion n’est pas comptée. Cependant si l’on compte les émissions de C02 de la combustion du bois(issues de l’agence environnementale italienne et compilées par Pognant 2017), le tableau n’est pas le même.

Par ailleurs, toutes les formes de bois énergie n’ont pas le même bilan carbone. Tout d’abord, le meilleur cas pour le climat consiste à brûler des résidus d’ arbres coupés (plaquettes forestières), le cas intermédiaire pour le climat consiste à se chauffer avec des résidus de scierie (granulés de bois) et le pire cas pour le climat consiste à bruler des arbres en entier (bois buche).

Le vrai bilan carbone des plaquttes forestières est de 100-300 g de C02/kWh 30 ans après la combustion du bois et environ 100 gC02/kWH 100 ans après la combustion du bois.

De plus, il faudrait aussi prendre en compte le temps de résidence du carbone dans les différents réservoirs de carbone. En effet le carbone qui était piégé dans le gaz serait resté longtemps dans le réservoir d’énergies fossiles si le gaz n’avait pas été extrait, alors que le carbone qui est séquestré par les arbres lors de la photosynthèse transite plus régulièrement entre l’atmosphère et le réservoir de biomasse

Si bruler du bois est néfaste pour le climat, quel serait le bon usage du bois ?

Il est possible de laisser les arbres, haies, peuplements forestiers stocker du carbone pendant des siècles. Le meilleur usage du bois pour le climat est assurément le bois matériau, composé du bois de meilleure qualité nommé le bois d’œuvre et de bois de moins bonne qualité nommé le bois d’industrie. Ce sont bien les très nombreux dérivés du bois industrie comme le lamellé-collé, panneaux, les isolants qui vont stocker du carbone sur une très longue durée de vie qu’il faut favoriser pour atténuer le changement climatique.

Au lieu de bruler du bois pour se chauffer qui émet du CO2, en transformant le bois en isolant bois cela permet non seulement de stocker le C02 dans les logements pendant des décennies mais aussi de décarboner le secteur chauffage en améliorant la performance énergétique des bâtiments. Cela permet aussi de ne pas beaucoup se chauffer l’hiver mais aussi de garantir une fraîcheur de la température en été lors des canicules qui seront de plus en plus présents.

Par ailleurs, il est possible de faire ce qu’on appelle la pyrolise du bois pour en faire du biochar. Il s’agit d’un procédé de combustion de biomasse qui produit en moyenne 30 % de biochar et 70 % de gaz très polluants qui peuvent, et même qui doivent, être brulés pour produire de l’énergie. La différence avec le bois énergie classique c’est que le biochar obtenu permet de stocker du carbone dans les sols agricoles, d’en améliorer la structure, de réduire l’acidité, de retenir l’eau au niveau des racines et même de lutter contre certains insectes ravageurs des cultures. Produire du biochar local pour améliorer la qualité des sols, les rendements agricoles et la résilience des cultures face au changement climatique, ce serait extrêmement précieux.

Pour conclure, ce n’est pas en brulant du bois que l’on sauvera le climat.