Extinction Rebellion, Scientifiques en Rébellion, L214 et plusieurs associations s’unissent et lancent un appel à l’Académie Vétérinaire de France pour plus de transparence et de débat autour de la question de l’élevage.

Alors que l’Académie Vétérinaire de France (AVF) organise une séance “Élevage et société” le jeudi 21 septembre 2023, force est de constater que l’ensemble des interventions prévues ne questionnent que très peu le modèle agricole destructeur que nous connaissons aujourd’hui et envisagent encore moins la réduction nécessaire de l’élevage pour une véritable transition agro-écologique. Les vétérinaires participants ont le droit d’accéder à des discours contradictoires et d’aborder avec transparence et exhaustivité la question de l’élevage et de ses impacts.



Lettre ouverte à l’Académie Vétérinaire de France

L’Académie Vétérinaire de France organise, le 21 septembre 2023, une journée sur « l’expertise scientifique pour une transition agroécologique réussie ». 

Dans son programme, l’Académie édifie l’élevage comme source de nutrition, de protection des pays du Sud, constituant des opportunités territoriales et circularités. Cela aurait pu en rester là, car chaque institution, après tout, choisit les histoires qu’elle raconte. 

Néanmoins, en se réclamant de la science, l’Académie en appelle à plus large qu’elle. La science n’est pas un parti pris qu’on choisit. Elle porte des valeurs et est au service des citoyens et citoyennes du monde aujourd’hui et pour le futur. Elle suit une éthique de la recherche qui inclut des mots comme intégrité, collégialité, pertinence, responsabilité, exhaustivité. 

En donnant la parole uniquement à des intervenants pro-élevages, l’Académie oublie que :

  • La biodiversité subit actuellement une crise majeure, dont l’élevage intensif est l’une des principales causes (rapport FAO, 2006). Cela se passe en Europe, mais aussi à l’abri de nos consciences dans les pays du Sud dont la production agricole est orientée pour soutenir la consommation de viande des pays du Nord. Cela implique la déforestation liée à la production d’aliments pour l’élevage, l’utilisation des ressources aquifères et l’accaparement des terres. Les élevages hors-sol viennent en compétition de ressources de la culture paysanne vivrière partout dans le monde. 
  • Sans réduction drastique de l’élevage, il ne sera pas possible de suivre l’Accord de Paris et d’éviter un effet d’emballement climatique dont l’instabilité risque de précariser encore plus la sécurité alimentaire et les pratiques agricoles de la majeure partie de l’humanité (Clarks et al., Science, 2020). 
  • La végétalisation de l’assiette permet une réduction des risques de nombreux cancers, une diminution de risques de maladies cardiovasculaires, et une diminution de diabète de type II, entre autres (rapport du Haut Conseil en Santé Publique, 6 avril 2023). L’Académie de Nutrition et de Diététique déclare de plus que « l’alimentation végétarienne bien planifiée, y compris végétalienne, est saine, adéquate sur le plan nutritionnel et peut être bénéfique pour la prévention et le traitement de certaines maladies. »
  • La réduction de la souffrance animale n’est pas atteignable dans des exploitations hors sol au regard des contraintes technico-économiques actuelles du système de production animale international. Pourquoi dédier une présentation à la Déclaration de Dublin sur le rôle sociétal de l’élevage et passer sous silence la Déclaration de Montréal, signée par 550 universitaires, affirmant l’indéfendabilité morale de l’exploitation animale ?
  • La majeure partie de l’azote ingérée par les animaux d’élevage n’est pas transformée en protéines, et une partie importante se retrouve rejetée dans l’environnement : il existe des solutions plus respectueuses, c’est-à-dire sans exploitation animale, ni destruction des écosystèmes, moins polluantes pour les cours d’eau et beaucoup plus efficaces pour nourrir le monde, en utilisant les produits et sous-produits des terres arables.
  • L’élevage industriel accroît les risques de circulation de virus pathogènes et de zoonoses (OMS, 2020). L’intensivité des productions est corrélée à une augmentation de l’utilisation d’antibiotiques et d’antiparasitaires qui contribue aussi à favoriser l’augmentation du risque de résistance en médecine humaine.

Partout dans le monde, les scientifiques demandent que leurs travaux ne soient pas utilisés pour protéger un agenda politique qui détruit la biodiversité et empêche la diminution des émissions de gaz à effet de serre. Pourquoi aucun des résumés présentés ne fait état des recommandations d’institutions de consensus international comme le GIEC, l’OMS et l’IUCN ?

Selon les alinéas 2, 9, 12 et 15 de l’article R242-33 du code de déontologie vétérinaire, les vétérinaires doivent « prend[re] en compte les conséquences de leur activité professionnelle sur l’environnement » et « acqu[érir] l’information scientifique nécessaire à leur exercice professionnel ». Mais surtout ils ne doivent pas « aliéner [leur] indépendance professionnelle sous quelque forme que ce soit ».

En ne permettant pas un débat ouvert et en ne présentant pas le consensus actuel sur la nécessité de diminution du cheptel de monogastriques et de polygastriques en France, l’Académie Vétérinaire de France va contre le mandat qu’elle prétend avoir, à savoir contribuer à la diffusion des progrès des sciences. Elle va contre les vétérinaires et leur mission de santé publique. Elle entretient aussi un scepticisme scientifique qui ampute les générations futures de la possibilité d’avoir une planète avec un climat stable.

En conséquence :

  • Nous demandons que l’Académie Vétérinaire de France lise cette lettre ouverte en introduction de sa journée scientifique et qu’elle laisse le consensus scientifique dont elle se réclame s’exprimer.
  • Nous demandons une table ronde ouverte à d’autres visions de l’élevage, avec des intervenant·es, avec un équilibre de genres, exprimant les données actuelles des connaissances lors de son colloque du 21 septembre 2023.
  • Nous demandons que l’ensemble des données soient présentées, de manière transparente, en respectant le consensus majoritaire international sur la transition nécessaire de l’élevage.

Nous constatons que la transition fait partie de vos préoccupations et sommes à votre entière disposition pour vous aider à avancer sur le sujet dans le sens du consensus scientifique.


Signataires : 

• Extinction Rebellion (Campagne Changement de Régime)
• Scientifiques en Rébellion
• L214
• Association Végétarienne de France
• Futur
• Projet Méduses
• On est prêt



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